Journal de bord – Visa pour l’image 2013 – Terminale ES.
Le jeudi 19 septembre 2013Tous les terminales ES se préparent. Nous allons à visa pour l’image à Perpignan. Là-bas nous allons découvrir le métier de journaliste, des expositions touchantes et bouleversantes nous allons même rencontrer un journaliste reporter !
Le départ s’annonce bien. Madame Négret emmène « quelques bras musclés » pour porter les cartons du déjeuner. Nous chargeons le bus et direction Perpignan !
Nous sommes vraiment stupéfaits par le monde qui attend. Des tonnes de collégiens et de primaires qui chahutent et parlent fort. J’ai souvent entendu ce genre de phrases : « j’étais comme ça avant ? » « On a bien changé ». Mais comme nous sommes des ados évolués nous patientons tranquillement que vienne notre tour. « Mettez vos sacs devant vous » On a dû nous le répéter une bonne centaine de fois. Bref, le sac par devant, nous entrons dans le bâtiment. Au départ il y a beaucoup d’autres classes et nous faisons la première exposition en coup de vent, sans pour autant ne pas nous intéresser aux magnifiques photos.
La première exposition (que nous avons choisi de vous présenter) est celle de Micheal Nichols. Ses photographies sont publiées dans le magasine National Geographic, qui explique la vie du lion. Ces photos sont prises dans le Serengeti, parc national du nord de la Tanzanie. Nichols et son associé ont étudié, camouflés, la vie du lion et ont, pour cela, suivi plusieurs groupes de félins.
La seconde exposition nous a un peu plus interpellées. C’est celle d’Andrea Star Reese, l’expo s’appelle Trouble.
Sans comprendre, ces images paraissent horribles et inhumaines. Après avoir lu le texte en dessous des photos, elles le sont encore plus.
Andrea prend ces photos dans un hôpital psychiatrique en Indonésie. Les conditions sont inhumaines, les « patients » n’ont pour certains, jamais été diagnostiqués. Les traitements qu’on leur donne sont souvent périmés ou inappropriés. Les malades sont enchaînés et enfermés. On appelle ça le pasung …
Sur la troisième photographie on peut voir des patients en cage. Agus, de dos, chante en faisant des gestes avec ses mains. Liana fixe le sol près des barreaux et Jarmoto regarde vers le photographe d’un air absent. Ils sont « sous traitement » tous les trois.
Ces centres médicaux nous montrent la misère, la pauvreté et la solitude des personnes internées. La photographe nous prouve que la prise en charge des patients n’est pas assurée comme il le faudrait.
« J'ai tendance à me forger une carapace dans ces cas là, à me dire que ce ne sont que des images. Mais c’est tellement plus que ça ... » Eva Honoré, terminale ES2.
La prochaine expo est celle de Jao Silva. Ce photographe a vu de très près la guerre et ses horreurs et en a lui-même subi les conséquences. Jao Silva a sauté sur une mine et a perdu ses deux jambes.
Ses images sont dures, affreuses mais représentatives de la réalité, de ce qui se passe là-bas. Le photographe décrit aussi bien par les mots ce qu’il a vu.
Nous ne mettrons que peu d’images de cette exposition pour ne donner qu'un léger aperçu de la violence et ne pas choquer.
Pour changer de registre nous verrons les photographies de Pascal Maitre, prises au Congo dans la capitale : Kinshasa. Cette ville ne ressemble en rien à l’idée que l’on peut se faire des tropiques. Elle est animée d’un incessant chaos, d’une énergie débordante et affolante. P. Maitre
A dit aussi, l’écrivain Henning Mankell : « Dans les années 1980, le Mozambique était ravagé par la guerre civile. Tandis que je marchais sur un chemin, j’ai rencontré un garçon. Il était pauvre, avait faim, ses vêtements étaient en loques, mais il s’était servi de son imagination pour préserver sa dignité en se peignant des chaussures sur les pieds. »Cette histoire pourrait être celle de la plupart des habitants de Kinshasa
Nous avons interrogé Jessica Dubessy à propose de l'image de gauche. A son avis que représente cette scène, qu'est ce que cela lui évoque ?
« L’image
représente deux garçons âgés d’à peu près 12 ans. Ils sont maquillés, portent
un costume traditionnel africain. Ils ont l’air soucieux, pensifs et
malheureux. On voit très clairement qu’ils souffrent de sous-nutrition, leurs
ventres sont si creux ! On peut penser que cette photo a été prise dans le
but d’accentuer la famine et la sous-nutrition qu’il existe dans les parties
les plus pauvres du monde. » Jessica Dubessy.
En réalité ce sont des enfants de la tribu Yaka de la province du Bandundu, lors de cérémonies traditionnelles. Ils inspirent et bloquent leur respiration pour produire cet effet spectaculaire. Comme dans beaucoup de cérémonies d'initiation, on cherche à impressionner les autres groupes ethniques.
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A la pause
déjeuner, nous avons fait la rencontre d’un journaliste-reporter, Bertrand
Gaudillère.
Vous pouvez retrouver son travail sur le site : http://www.collectifitem.com/author/bertrand/
B. Gaudillère nous
a parlé de son métier.
Le journaliste
donne l’information et l’explique avec des photos, c’est une forme d’écriture
en quelque sorte. Son travail est toujours différent, aucun photographe n’a le
même point de vue. Selon le moment, selon l’instant, la photo ne sera jamais la
même. Il choisit le moment qu’il pense être le plus représentatif. Il choisit
la profondeur du champ, l’ombre, la localisation, … Le photographe témoigne
d’une réalité, son rôle est tout d’abord de prendre la photo. A tout
prix.
Beaucoup d’élèves
ont été choqué que B. Gaudillère dise « D’abord la photo, après les
victimes » Mais faire la photo n’est pas inhumain. Justement ces victimes
veulent qu’il y ait une trace, ils veulent aussi témoigner.
Bertrand Gaudillère
a beaucoup travaillé sur le sujet de l'immigration et des sans papiers. Il veut rendre compte de l’état de la société, de l’exclusion et de la
conscience politique de certains citoyens.
Un élève a demandé
pourquoi les médias n'utilisent pas plus les photos des reporters comme lui (notamment sur le thème des sans-papiers). Il
nous a répondu : Quel intérêt à mettre à mal la politique du
gouvernement ? Car la presse est libre, il n’y a pas de censure mais à qui
appartient la presse ?
Cela nous a
beaucoup fait réfléchir et nous a donné envie de faire des recherches sur ces thèmes.
Ses prochains travaux porteront sur la grande précarité en France et la mobilisation des civils en
Turquie.
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Nous ne
pouvons pas résumer toutes les autres expositions trop nombreuses. Beaucoup d''entre elles montrent une
terrible violence. Nos mots pour les décrire seront suffisants.
Derrière
l'objectif, il y a eu un homme qui a vécu ces moments qu'il a capturé pour
nous. Des moments durs, dans les mêmes conditions que les autochtones, dont il
nous dévoile un peu de leur intimité. Que ce soit des moments de répit pour les
soldats de l'ASL, des moments d'humiliation pour des personnes à déficience
mentale, ou des moments de joie lors de mariage indien.
Pour ces
hommes qui ont suivi des soldats, pour nous donner un aperçu des épreuves
traversées, et qui ont, lors de ces reportages, perdu leurs jambes car ils ont
sauté sur une mine, qui ont assisté à tant d'horreur, vu tellement de sang
couler, ... Du sang innocent, du sang d'enfant, ... Du sang des personnes qui
ont voulu tant bien que mal aider, protéger leur famille, leurs proches.
La cruauté
que nous avons vu sur ces photos nous a laissé sans voix et nous a beaucoup
touchées. Les larmes ont coulé d’elles-mêmes tellement le choc était violent.
Des femmes torturées par leurs maris, de véritables boucheries, des hommes
mutilés, des enfants mourant de faim, des femmes défigurées, des hommes coupés
en deux, des têtes arrachées, des corps criblés de balles ou d’éclats d’obus,
des enfants baignant dans leur sang, les pères penchés sur leurs corps sans vie
et les femmes à genoux, priant.
Une
histoire m’a particulièrement touchée. Celle de Somayeh Mehri (29 ans) et Rana
Afghanipour (3ans), une mère et se fille qui vivent à Bam dans le sud de
l’Iran. Elles ont été victimes d’une attaque à l’acide perpétrée par le mari
de Somayeh. Celle-ci fréquemment battue et enfermée par son mari, avait enfin
trouvé la force de demander le divorce. Il l’a prévenu qui si elle persistait à
vouloir le quitter, elle ne terminerait pas sa vie avec le visage qu’elle
avait. Une nuit de juin 2011, il versa de l’acide sur Somayeh et Rana pendant
qu’elles dormaient. Leurs visages, leurs mains et certaines parties de leurs
corps ont été sévèrement brûlés. La mère est devenue aveugle et la petite Rana,
borgne. Des amis du village les ont aidées à payer les frais médicaux et le
père de Somayeh a vendu sa terre pour récolter de l’argent.
Voici les
photos de ces deux femmes courageuses : http://img11.hostingpics.net/pics/130904P1140304.jpg ATTENTION âmes
sensibles s’abstenir.
En haut à
gauche : Elles s’embrassent. Depuis qu’elles sont défigurées les autres
répugnent à les embrasser.
A
droite : Rana se regarde dans un miroir.
En bas à
gauche : les médecins ajustent un œil de verre à Rana.
A
droite : Somayeh préfère ne plus entretenir de relations et passe la
majeure partie de son temps à prier.
L’histoire
poignante de Somayeh et sa fille m’a vraiment bouleversée.
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Cette
petite escapade nous a été très bénéfique. Notre point de vue a changé, nous
nous rendons compte de la chance que nous avons. Tandis que d’autres ne l’ont
pas : ces gens sont forts, courageux mais surtout marqués par la vie. Ces
ignominies nous ont fait réagir. Visa pour l’image nous a montré le nombre de
morts qu’il y a chaque seconde, la violence, la guerre, la triste et misérable
vie à laquelle tous ces gens sont habitués, les conditions de vie abominables,
l’horreur. Nous avons vu des choses déconcertantes et émouvantes. La capacité
humaine à s’entre-tuer nous a beaucoup troublés, mais aussi celle du sacrifice.
Certaines
expositions n'étaient pas si démoralisantes. Nous avons beaucoup appris sur
d'autres cultures, d'autres pays, certaines traditions toutes très différentes
de notre quotidien.
Marion Vastesaeger.Margot Verpeaux, Eva Honoré.
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